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Turquie : libération d'une journaliste de l'AFP interpellée en marge du Nouvel An kurde


Dimanche 17 mars 2024 à 20h18

Istanbul, 17 mars 2024 (AFP) — Une journaliste de l'AFP a été interpellée dimanche par la police turque et relâchée après avoir été retenue plus de six heures sous une pluie d'insultes, en marge des célébrations du Nouvel An kurde à Istanbul.

Eylul Yasar, du service vidéo de l'AFP, a annoncé sa remise en liberté ainsi que celle de quatorze personnes enfermées en même temps qu'elle, en majorité des femmes, dans le même fourgon.

Elle s'apprêtait à filmer les célébrations de Norouz, le Nouvel An kurde, quand elle a été interpellée à un point de contrôle, avaient expliqué des journalistes présents.

Des avocats de l'Association des Avocats pour la Liberté (ÖHD), présents, avaient évoqué une cinquantaine d'interpellations au total.

"Nous savons que quatorze personnes détenues ont été libérées", a confirmé à l'AFP Emine Özhasar, une avocate de l'association MLSA, qui réunit des avocats défenseurs des droits humains et des médias.

"De nombreuses personnes ont été arrêtées mais nous ne connaissons pas encore leur nombre" total, a-t-elle ajouté.

- Pluie d'insultes -

Eylul Yasar, retenue avec dix femmes et trois hommes dans le même fourgon, a raconté avoir été "menottée très serrée".

Selon elle, l'interpellation s'est passée "extrêmement vite" après qu'elle eut protesté contre une fouille corporelle qu'elle jugeait "brutale et trop insistante".

"La police nous a insultées, traitées de fientes de porcs, de terroristes, de traîtres", a-t-elle témoigné : "Outre les commentaires sexistes, ils nous ont dit qu'on avait de la chance de ne pas être brûlées vives et transformées en savons comme les juifs", une allusion aux camps d'extermination nazis de la Deuxième guerre mondiale, a-t-elle poursuivi.

Par ailleurs, deux journalistes du site internet d'information Bianet qui filmaient les arrestations ont déclaré avoir été jetés au sol et battus par la police. Ils ont annoncé leur intention de porter plainte.

La direction de l'AFP a regretté ces faits dimanche soir.

"L'AFP déplore la détention de notre journaliste Eylul Yasar qui ne faisait que son métier. Tout en saluant sa remise en liberté, l'AFP appelle les autorités turques à respecter les droits des journalistes et à les traiter avec respect".

Erol Önderoglu, correspondant en Turquie de l'ONG Reporters sans frontières (RSF), a "dénoncé cette interpellation arbitraire qui l'aura empêchée de faire son travail", a-t-il dit à l'AFP.

Les Kurdes, qui représentent un cinquième environ des 85 millions d'habitants de la Turquie selon des estimations, font face à d'importantes discriminations dans ce pays.

L'ex-figure de proue du principal parti prokurde HDP (devenu DEM), Selahattin Demirtas, est emprisonné depuis 2016 pour "propagande terroriste".

Selon le classement RSF des pays en fonction de leur respect de la liberté de la presse, la Turquie se classait en 2023 au 165e rang sur 180, en recul de seize places par rapport à 2022 (149e).

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.