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Turcs tués en Irak: Erdogan accuse les Etats-Unis de soutenir les "terroristes" kurdes


Lundi 15 février 2021 à 14h36

Ankara, 15 fév 2021 (AFP) — Le président Recep Tayyip Erdogan a ravivé lundi l'un des principaux points de contentieux entre la Turquie et les Etats-Unis en les accusant de soutenir les "terroristes" kurdes après "l'exécution" selon Ankara de 13 Turcs en Irak aux mains des rebelles du PKK.

La charge de M. Erdogan contre Washington s'est accompagnée d'un coup de filet dans les milieux prokurdes en Turquie avec plus de 700 arrestations annoncées par les autorités turques.

"Les déclarations des Etats-Unis sont déplorables. Vous dites ne pas soutenir les terroristes mais vous êtes bel et bien à leur côtés", a déclaré M. Erdogan lors d'un discours.

La Turquie a accusé dimanche le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) d'avoir exécuté 13 de ses ressortissants, membres des forces de sécurité pour la plupart, qu'il retenait en captivité dans le nord de l'Irak depuis plusieurs années.

Selon le ministre turc de la Défense Hulusi Akar, des militaires turcs ont découvert 13 corps sans vie dans une grotte dans la région de Gara, dans le nord de l'Irak, où Ankara mène depuis mercredi une opération contre le PKK, un groupe qualifié de "terroriste" par Ankara et ses alliés occidentaux.

Le PKK a reconnu la mort d'un groupe de prisonniers, mais a réfuté la version d'Ankara, affirmant qu'ils avaient été tués dans des frappes aériennes turques.

Le département d'Etat américain a déclaré dimanche "déplorer" ces morts. "Si les informations sur la mort de civils turcs aux mains du PKK, une organisation classé terroriste, se confirment, nous condamnons ces actions dans les termes les plus forts", a-t-il ajouté dans un communiqué.

Les déclarations de M. Erdogan rejetant la condamnation américaine traduisent la méfiance d'Ankara envers Washington en ce qui concerne sa politique à l'égard des rebelles kurdes.

Si Washington considère le PKK comme une organisation terroriste, il n'en soutient pas moins des milices kurdes qui y sont liées en Syrie dans le cadre de la lutte contre le groupe Etat islamique (EI).

Ce soutien aux milices kurdes syriennes des YPG, qui a commencé sous l'administration de Barack Obama, est depuis plusieurs années au coeur des tensions qui plombent les relations turc-américaines.

- "En mille morceaux" -

"Vous ne pouvez pas être avec les terroristes. Si vous voulez vous ranger du côté d'une des parties, soyez à nos côtés", a ajouté M. Erdogan à l'adresse de Washington.

Les pertes annoncées dimanche ont accentué la pression sur le parti prokurde de Turquie, le HDP, que les autorités turques présentent comme la vitrine politique du PKK.

Le ministère turc de l'Intérieur a ainsi annoncé lundi que les forces de sécurité avaient arrêté 718 personnes, dont des dirigeants du HDP, soupçonnées de liens avec le PKK.

"Un grand nombre d'armes, de documents et du matériel numérique appartenant à l'organisation (terroriste) ont été saisis lors des perquisitions", a ajouté le ministère de l'Intérieur, précisant que des opérations dans 40 villes à travers le pays étaient toujours en cours.

Le HDP avait exprimé dimanche sa "profonde tristesse" après la mort des ressortissants turcs en Irak, appelant le PKK à libérer ses prisonniers restants.

La Turquie mène régulièrement des attaques dans les zones montagneuses du nord de l'Irak contre les bases arrières du PKK, qui livre depuis 1984 une sanglante guérilla sur le sol turc qui a fait plus de 40.000 morts.

Ces opérations suscitent des tensions avec le gouvernement irakien, mais M. Erdogan répète que son pays entend "s'occuper" du PKK dans le Nord de l'Irak si Bagdad n'est "pas en mesure de le faire".

"Aucun pays, (aucune) personne ou institution ne peut questionner désormais les opérations militaires de la Turquie (en Irak), après le massacre de Gara", a répété M. Erdogan lundi.

"Les terroristes ne seront plus en sécurité nulle part, ni à Kandil ni à Sinjar" dans le nord de l'Irak, a-t-il ajouté.

Quelques heures après l'annonce de la mort des treize Turcs, le ministre de l'Intérieur Suleyman Soylu a promis que les forces turques allaient capturer le chef militaire du PKK, Murat Karayilan, qui se trouverait dans le nord de l'Irak.

"Si nous n'arrivons pas à capturer Murat Karayilan pour le découper en 1.000 morceaux, que le peuple me crache au visage", a-t-il lancé.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.