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Kurdistan irakien: lourdes peines de prison contre des journalistes et militants


Mardi 16 février 2021 à 21h09

Erbil (Irak), 16 fév 2021 (AFP) — Un tribunal de la région du Kurdistan irakien a condamné mardi cinq journalistes et militants à six ans de prison pour leur rôle dans des manifestations antigouvernementales en 2020, a indiqué leur avocat.

Des manifestations contre le gouvernement régional kurde et les principaux partis de cette région autonome du nord de l'Irak ont éclaté à l'automne à travers la province de Souleimaniyeh pour protester contre des salaires en retard ou impayés dans la fonction publique.

Aso Hashem, avocat des cinq hommes, a déclaré à l'AFP qu'ils avaient été arrêtés en octobre à la suite de ces manifestations. Ils étaient poursuivis, selon lui, pour "incitation à manifester contre le gouvernement et à déstabiliser la région".

Le tribunal d'Erbil les a condamnés à six ans de prison, a précisé l'avocat, ajoutant qu'il allait interjeter appel.

Karwan Anwar, chef d'un syndicat de médias à Souleimaniyeh, la deuxième ville du Kurdistan irakien, a dénoncé ce verdict "très sévère".

"Nous sommes à la croisée des chemins, c'est la première fois qu'un tribunal condamne à six ans de prison pour avoir simplement exprimé son opinion", a déclaré M. Anwar à l'AFP.

"Est-ce que (la région) va redevenir un espace ouvert, comme nous avons longtemps été considérés, ou nous dirigeons-nous vers des jours sombres"?, a-t-il poursuivi.

Le Kurdistan irakien a longtemps été considéré comme un refuge sûr pour les journalistes et pour les militants qui étaient malmenés ou menacés dans d'autres régions irakiennes.

Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a jugé mardi que ce n'était plus le cas après ce verdict.

Selon son représentant au Moyen-Orient Ignacio Miguel Delgado, cette condamnation est "non seulement injuste et disproportionnée mais elle prouve également que le gouvernement régional du Kurdistan a mis fin à sa prétention de se soucier de la liberté de la presse".

Des groupes de défense des droits humains locaux et internationaux ont accusé en décembre le gouvernement régional de "cibler les militants de la société civile en les arrêtant pour leurs activités et de réduire les libertés publiques, y compris la liberté de la presse et la liberté de réunion pacifique".

Mais les autorités ont réfuté de telles accusations. Lors d'une conférence de presse la semaine dernière, le Premier ministre du Kurdistan irakien Masrour Barzani a accusé les journalistes et les militants arrêtés en 2020 d'être des "espions".

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.