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Irak: vent de fronde politique contre la loi sur le pétrole


Jeudi 5 juillet 2007 à 14h05

BAGDAD, 5 juil 2007 (AFP) — Le mouvement du leader radical chiite Moqtada Sadr a rejoint jeudi les groupes sunnites et kurdes protestant contre un projet de loi du gouvernement irakien sur le pétrole, qui promet de vifs débats au Parlement de Bagdad, sur fond de pressions américaines.

Considérée par Washington comme un élément essentiel de la réconciliation nationale en Irak, cette loi visant à partager équitablement les revenus du pétrole brut entre les 18 provinces est un sujet particulièrement sensible dans ce pays assis sur les troisièmes réserves mondiales d'or noir.

Le vent de fronde contre ce projet, adopté à l'unanimité mardi par le gouvernement du Premier ministre chiite Nouri al-Maliki, pourrait reporter son éventuelle adoption à la rentrée de septembre, en dépit de la prolongation d'un mois de la session parlementaire, qui s'achèvera fin juillet.

Aux yeux de Joost Hiltermann, directeur pour le Moyen-Orient de l'association International Crisis Group, cette loi ne pourra être adoptée si les Kurdes et les sadristes s'y opposent.

Mais elle a des "chances de succès" et n'aura "peut-être pas besoin de l'aval des sadristes s'il y a un accord entre (les partis chiites) Conseil suprême et Dawa (le mouvement de M. Maliki) et les Kurdes. C'est la même coalition qui pour l'essentiel gouverne l'Irak depuis janvier 2005", prédit l'analyste.

"Les discussions sur la loi pourraient durer au moins un mois", a prévenu de son côté le député Hassan al-Sinad, un influent parlementaire membre de l'Alliance unifiée (chiite) et proche de M. Maliki, dans les colonnes du quotidien irakien Al-Sabah.

Selon un conseiller de M. Maliki cité par le journal, l'examen du texte devrait débuter la semaine prochaine au Parlement, où les débats s'annoncent animés.

Le groupe Sadr, qui a permis l'élection de M. Maliki mais est devenu l'un de ses principaux opposants, a fait savoir jeudi qu'il s'opposerait catégoriquement à toute loi permettant à des sociétés dont "les pays occupent l'Irak" de conclure des accords pétroliers avec ce pays, en allusion aux Etats-Unis, à la Grande-Bretagne et à leurs alliés.

C'est justement ce que prévoit l'un des articles du texte. "C'est la chose à laquelle nous sommes le plus opposés", a averti le leader sadriste au Parlement, Nassar al-Roubaie.

Ce type d'accord reviendrait à "sous-estimer la souveraineté de l'Irak à court terme et à lui retirer sa souveraineté sur le long terme", a ajouté le député de ce groupe, qui occupe 32 des 275 sièges de l'Assemblée.

Les Kurdes, en revanche, ne sont pas opposés à cet aspect de la loi. Car les investisseurs étrangers sont attirés par le Kurdistan, région du nord de l'Irak épargnée par les violences.

Le gouvernement régional du Kurdistan proteste surtout contre le fait de ne pas avoir été consulté avant l'adoption d'un amendement au texte en conseil des ministres et mis en garde contre tout changement touchant à sa "substance".

Un porte-parole du gouvernement irakien, Ali al-Dabbagh, avait assuré que les changements portaient uniquement sur des modifications dans la formulation du texte.

De son côté, le Front irakien de la Concorde, principal groupe sunnite au Parlement, avait lui aussi déploré mercredi l'absence de consultation: "Nous ne savons rien au sujet de la dernière version adoptée en conseil des ministres".

La loi sur le pétrole avait été approuvée une première fois en conseil des ministres en février, mais elle avait dû être réexaminée en raison de réserves des diverses communautés.

En Irak, les réserves de pétrole sont concentrées dans le sud chiite et le nord majoritairement kurde, peu disposés à partager cette manne, tandis que les sunnites, écartés du pouvoir après la chute du régime de Saddam Hussein, vivent dans des régions dénuées de pétrole.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.